Coupe du monde 2022 : à Bondy, l'heure de la déception pour
"Alleeeez Kyliiiiiiaaaaaan !" : emportée dans un grand huit émotionnel durant plus de deux heures, Bondy (Seine-Saint-Denis) a assisté avec tristesse dimanche à la défaite sur le fil de l'enfant du pays et des Bleus face aux Argentins en finale du Mondial de football.
Pour ce match trois étoiles, près de 250 personnes se sont rassemblées pour regarder la finale au palais des sports de la ville d'origine de Kylian Mbappé. "Il a grandi ici, c'est notre fierté !", résume Soumia Abbou, une voisine venue assister à l'événement avec ses deux filles.
Dans le gymnase municipal, des barrières sont dressées pour l'occasion autour des rings de boxe. Des chaises s'alignent en rangs d'oignons sur le terrain de basket. Un rétroprojecteur diffuse le match en direct du Qatar sur un mur en briques.
En présence de nombreux parents et enfants en bas âge emmitouflés, maquillage bleu-blanc-rouge sur les joues, l'ambiance est familiale. Les paquets de chips et de bonbons tournent de main en main, on débouche une bouteille de Coca.
Comme pour la demi-finale face au Maroc, la municipalité a mis la salle à disposition pour permettre aux habitants de cette commune populaire de partager à peu de frais un moment d'élan collectif.
"Les lieux privatisés, il faut consommer. Si vous venez avec femme et enfant, vous vous en sortez avec une facture de 30-40 euros. Tout le monde ne peut pas se permettre ça", explique à l'AFP Mahmoud Bourassi, agent municipal et l'un des organisateurs de l'événement. À peine la Marseillaise chantée debout, la domination et les deux premiers buts argentins refroidissent une température déjà passablement fraîche à l'intérieur.
"C'est chaud. Mbappé est marqué à la culotte", constate avec impuissance à la mi-temps Sabri Ghenim, un agent immobilier de 22 ans qui a été entraîné à l'AS Bondy par Mbappé père.
"J'ai plus d'émotions"
Anesthésiée, déjà résignée, la salle laisse filer la seconde période. La défaite est dans toutes les têtes. On discute, le match est devenu secondaire, on suit le jeu d'un œil.
Lorsque soudain, la libération. Le doublé de "Kylian", 80e et 81e minutes. Le gymnase explose, les petits hurlent à gorge déployée, les chaises valsent. Secoué par le mouvement de foule, le projecteur se fige par à-coups. L'espoir renaît.
"Hamdoulilah !", exulte Khadija, une Bondinoise en perruque bleu-blanc-rouge, agitant un grand drapeau tricolore au bout d'une hampe. "D'abord là pour Kylian, ensuite pour l'équipe de France", elle refusait de céder au désespoir jusqu'au coup de sifflet final.
"Je m'étais dit je ne vais pas me stresser mais franchement j'avais mal au ventre. Là ça va beaucoup mieux", se réjouit-elle. La prolongation se passe dans une atmosphère tendue. Au but de Messi répond un nouveau but de Mbappé. 3-3, tirs au but... "Ce match est incroyable, l'ambiance est ouf', il y a beaucoup d'enfants", s'extasie Mona.
Mais les tirs au but couronnent l'Argentine et viennent doucher les rêves de Bondy d'un nouveau sacre. Au milieu de la salle, les yeux écarquillés et le visage défait, Rodrigue Mbdey, 17 ans, se tient immobile, sidéré : "j'ai plus d'émotions, je ne sens plus rien" Sans demander son reste, l'assemblée se disperse rapidement dans une humeur morose. Enveloppé dans un drapeau français, un jeune soupire : "La prochaine fois, on l'aura j'espère..."