La Mauritanie par des exploratrices d’hier et aujourd’hui
Deux journalistes ont marché dans le sillage d’exploratrices atypiques, parties dans le Sahara occidental un siècle plus tôt. Un regard croisé inédit sur la Mauritanie.
Désert, pierres et traditions
En Mauritanie, le Sahara rencontre l’Atlantique et, si l’on n’y trouve pas les plus belles dunes du monde, de majestueux paysages désertiques demeurent. La géologie mauritanienne est spectaculaire : on croirait que les pierres pourraient parler et nous raconter à la fois passé et présent… Le rapport au temps y est unique. Même si les villes se développent, la culture nomade subsiste, avec notamment sa remarquable tradition des trois thés. Elle contraint le visiteur à ne pas se limiter à la brièveté des échanges. Les Mauritaniens se caractérisent aussi par leur ouverture à l’autre et leur sens de l’accueil.
18 Janvier 2023 - Culture / Histoire / Nature / Portrait
Deux journalistes ont marché dans le sillage d’exploratrices atypiques, parties dans le Sahara occidental un siècle plus tôt. Un regard croisé inédit sur la Mauritanie.
Désert, pierres et traditions
En Mauritanie, le Sahara rencontre l’Atlantique et, si l’on n’y trouve pas les plus belles dunes du monde, de majestueux paysages désertiques demeurent. La géologie mauritanienne est spectaculaire : on croirait que les pierres pourraient parler et nous raconter à la fois passé et présent… Le rapport au temps y est unique. Même si les villes se développent, la culture nomade subsiste, avec notamment sa remarquable tradition des trois thés. Elle contraint le visiteur à ne pas se limiter à la brièveté des échanges. Les Mauritaniens se caractérisent aussi par leur ouverture à l’autre et leur sens de l’accueil.
Exploratrices d’hier…
Dans les années 1930, des exploratrices se sont passionnées pour cette civilisation. Odette du Puigaudeau et Marion Sénones sont tombées dans l’oubli, alors que leurs exploits et leurs écrits auraient pu leur offrir une notoriété similaire à celle d’Alexandra David-Néel. Malgré un style difficile d’accès, leurs ouvrages et carnets de voyage sont de précieux témoignages sur la culture nomade du Sahara occidental. Ces vestiges d’un monde disparu sont d’une grande richesse.
Près de cent ans plus tard, Catherine Faye et Marine Sanclemente, journalistes et autrices, sont parties sur leurs traces. Est ainsi né le livre "L'Année des deux Dames".
Catherine les présente :
"Odette et Marion sont deux femmes journalistes, homosexuelles et libres pensantes qui fuient le quotidien sclérosant du Paris des années 1930. La liberté qu’elles ne peuvent vivre en France, elles l’éprouveront dans le désert mauritanien."
En leur temps, leur passage marque tant les esprits que l'année 1934 est désignée en Mauritanie comme l'année des deux dames, en référence à leur premier voyage. Marine explique pourquoi on les connaît si peu en Occident : "Ce sont deux personnalités contradictoires… Elles ont été peu agréables avec des rédacteurs en chef parisiens comme avec la famille présidentielle mauritanienne. Elles ont toujours eu beaucoup de frustrations."
Au fil de "L'Année des deux Dames", les héroïnes ne paraissent en effet plus si héroïques. Marine précise : "On pense à tort qu’on ne peut apprécier l’histoire d’une personne que si elle a été irréprochable. Odette et Marion ont été racistes, colonialistes. Elles ne sont pas lisses ! Leur part d’ombre n’enlève pas leur courage. Un courage inouï pour leur époque."
Catherine complète :
"Dans les récits, on omet souvent ce qui est imparfait. Pourtant tout le monde a des contradictions. C’est peut-être la spécificité de notre écriture à quatre mains : nos deux regards se répondent et se complètent, on a dû faire preuve d’entière honnêteté !"
... et pépites d’aujourd’hui
"L'Année des deux Dames" est écrit par un binôme de femmes tissant des liens entre les hommes, les cultures et les époques. Leur regard sur la Mauritanie est sensible.
C’est Ouadane, découverte en fin de journée, qui a fasciné Marine :
"Dans la lumière dorée, on ne distinguait plus la ville fortifiée construite à même la roche de la colline avec son oued asséché bordé de palmiers… Nous avons passé la nuit dans une auberge tenue par une femme épatante qui a créé cet établissement seule. Elle avait cuisiné un couscous merveilleux et appelé les villageoises pour partager une soirée unique !"
La rencontre avec le Guelb-Er-Richât a marqué Catherine : "On nomme cette structure géologique de 50 km de diamètre l’œil de l’Afrique du fait de son aspect vu de l'espace. Longtemps considéré comme une énigme, on sait aujourd’hui qu’il s’agit d’un ancien volcan retombé comme un soufflé. Quelle magie de dormir au centre de ce dôme magmatique longuement étudié par Théodore Monod ! Je sentais les vibrations de la Terre, j’avais l’impression d’être incorporée à la nature."
"L'Année des deux Dames" nous permet de découvrir une Mauritanie subtile, bien au-delà des clichés.
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